La complexité des poubelles de recyclage vous donne des boutons ? Alors conservez vos canettes pour vous lancer dans une carrière artistique ! Les possibilités offertes par cet art vont vous laisser pantois. C’est fou tout ce qu’on peut faire à partir de boîtes de Coca-Cola et de Heineken !
Copyright : Makaon
La canette n’est pas la femelle du canard
Enfin, si, aussi. Mais ce n’est pas de cette canette dont nous parlons ici. La canette alimentaire, produite en aluminium (après avoir été en fer-blanc) n’a rien à voir avec les canards. Et si vous avez une mis une canette (animalière) au frigo, n’essayez surtout pas de l’ouvrir en tirant sur l’anneau !
En 2013, plus de 300 milliards de canettes (alimentaires) ont été distribuées à travers le monde. Une fois consommées, elles n’ont plus grande utilité : en général on s’en débarrasse. Dans le meilleur des cas, on les jette dans une poubelle de recyclage. Dans une poubelle classique, aussi, même si c’est moins bien. Et dans le pire des cas, elle atterrit sur le trottoir ou dans la nature.
Mais il existe d’autres solutions. Certains les collectionnent – n’avez-vous jamais vu un rayonnage de boîtes en aluminium de toutes les couleurs chez un ami ? D’autres les fondent pour réutiliser le métal ainsi obtenu. Et d’autres encore s’en servent pour produire de l’art : ils font de la sculpture de canettes.
La sculpture de canettes, un geste éco très logique
Ces couleurs vives affichées par les canettes des diverses marques, et qui ont pour but d’attirer le regard d’un consommateur confronté à une concurrence toujours plus féroce, sont ici détournées au profit d’une création artistique originale. Le rouge de Coca-Cola peut servir à un superbe Mario, et le jaune de Dark Dog à un mignon Pikachu.
Ce type de sculpture est d’abord un geste écologique. Il faut savoir qu’une canette jetée dans la nature mettra environ 100 ans pour disparaître, alors qu’elle est entièrement recyclable. Plus que du gâchis, abandonner sa boîte ailleurs que dans une poubelle est un crime contre la planète.
Le mode de consommation portative qui caractérise les canettes font qu’elles sont consommées essentiellement en dehors de la maison. Et, on ne le sait que trop bien, les consommateurs dénigrent à la nature un droit qu’ils appliquent pourtant chez eux : celui de ne pas laisser traîner des déchets.
Rien qu’en France, on l’achète dans des quantités astronomiques : si toutes les boîtes bues chaque année étaient mises bout à bout, elles pourraient atteindre la lune. Ce serait plus économique que d’envoyer des fusées Apollo, mais avouez que c’est terrifiant.
Copyright : Makaon
Des artistes éco-responsables
Animés par une prise de conscience écolo, des artistes se sont attelés à la tâche. Jouant avec les boîtes vides comme on manipule du papier pour faire de l’origami, ils travaillent la matière pour la transformer et la transfigurer, extirpant du métal des objets et des personnages extraordinaires de précision.
L’artiste japonaise Makaon, par exemple, s’est appropriée l’univers geek des jeux vidéo, des mangas et des dessins animés pour créer des dizaines de personnages (Mario, Batman, Buzz l’Éclair, des Pokémon) et d’objets (des masques de Dark Vador) qui titillent l’imaginaire populaire.
L’initiative écolo d’Alfredo Longo
Le peintre belge Alfredo Longo a décidé en 2008 d’utiliser son art à des fins pédagogiques. L’artiste-citoyen s’est lancé dans la fabrication de sculptures à partir de canettes pour mieux montrer du doigt les dérives du gaspillage et les nécessités du recyclage. Son slogan ? « Un geste pour la planète, un cœur tout en canettes ».
Pour sensibiliser les gens aux gestes écologiques, Longo a déployé une initiative qui s’appuie sur la participation des citoyens : c’est le grand public au sens large (individus, institutions, entreprises, écoles) qui est chargé de lui envoyer des canettes par milliers, et qui permettent in fine à son art d’exister.
Ses sculptures monumentales, qui dessinent des cœurs et des visages, sont faites pour être exposées dans les espaces publics. Pas question de les enfermer dans des musées : elles doivent communiquer directement avec les observateurs, premiers concernés par le message de l’artiste.
La canette n’est toutefois pas un matériau aisé à travailler. Le métal est coupant et les doigts ont tendance à frôler les bords aiguisés comme des couteaux. Longo raconte qu’au fil de ses créations, il a dû se faire soigner à plusieurs reprises pour des infections mal soignées dues à des microcoupures. L’art est une prise de risques !
Copyright : Red Bull Exhibition Art
Red Bull donne de l’art ?
D’autres initiatives naissent régulièrement. La marque Red Bull participe pleinement de ce mouvement artistique en proposant des expositions de sculptures en canettes. Cette compétition internationale invite sculpteurs, designers et créateurs de tous poils à utiliser les boîtes en aluminium pour donner vie à leurs idées, avec une grande liberté d’action :
- Des sculptures en canettes physiques
- Des modèles digitaux édifiés en 2D ou 3D, à condition qu’ils soient affichés sur un écran et qu’on puisse les manipuler
- Et même des installations qui interagissent avec leur environnement
La canette n’est donc plus seulement cet objet en métal que l’on consomme avant de l’abandonner aux quatre vents : elle est devenue un matériau artistique, un objet que l’on peut moduler à l’envi, et qui s’est même affranchi de ses limites physiques pour se projeter dans le digital. Et ça, promis, ce n’est pas un canard* !
(* Un canard, au sens journalistique, est une bourde, une chose absurde présentée avec toutes les apparences de la vérité.)