Inutile de le nier, vous avez forcément, au moins une fois dans votre vie, pris part à une discussion animée dont l’objet était de savoir s’il fallait dire pain au chocolat ou chocolatine pour désigner la célèbre et délicieuse viennoiserie. Depuis des années, la France traverse une crise d’identité sans précédent sur le plan culinaire. De la même façon que l’Union s’opposa aux Confédérés durant la guerre de Sécession, le Sud s’oppose au Nord dans notre beau pays. L’un dit chocolatine. L’autre dit pain au chocolat. Qui a raison ? Et surtout, y a-t-il nécessairement une appellation plus correcte qu’une autre ? Cet article a pour but de dégager – si tant est que cela soit possible – quelques éléments de réponse.

 Le bastion de la chocolatine n’est pas très grand

Si l’on prête un regard à l’une des nombreuses cartes dressées par les experts pour définir les zones au sein desquelles l’une ou l’autre appellation dominait, on constate d’emblée qu’il n’y a concrètement qu’une petite enclave, dans le sud de la France, qui parle de chocolatine. Grosso-modo, cette enclave s’étend des Pyrénées à Bordeaux. Les gens du Massif Central disent déjà pain au chocolat ! Alors, pain au chocolat ou chocolatine, il apparaît clairement que les traditions ne sont pas les mêmes.

pain au chocolat

Cependant, il faut prendre une chose en considération : ce n’est pas parce qu’une majorité de personnes pense ceci ou cela, que ceci ou cela est correct ! Et d’un point de vue purement logique, un pain au chocolat est avant tout un pain. Or, la viennoiserie dont nous parlons n’a ni l’aspect, ni la texture, ni la composition du pain.

Les origines

Tout commence à Vienne. Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi on parlait de viennoiseries ? Tout simplement parce qu’au XIXème siècle, la France et l’Autriche se sont rapprochées l’une de l’autre, ont commencé à échanger leurs cultures. Nos compatriotes ont découvert avec plaisir l’existence de gourmandises sucrées, délicieuses, spécialement autrichiennes, spécialement viennoises, et notamment le pain au chocolat ou chocolatine. Les Français se sont donc emparés de la recette et ont commencé à cuisiner les mêmes choses, en les appelant des viennoiseries.

C’est d’ailleurs au 92 rue Richelieu que la première viennoiserie ouvre ses portes en 1830. Le boulanger qui dirige l’établissement est autrichien ; il s’appelle Auguste Zang (en savoir plus ici). Il prépare des Kipferl, qui deviendront nos croissants. Il prépare des Schokoladencroissant, des sortes de Kipferl avec du chocolat à l’intérieur. Mais ce nom, Schokoladencroissant, est difficile à prononcer. D’autant qu’avec son accent à couper au couteau, notre ami Zang semble dire quelque chose comme Chocolaten-croissant. Alors, chocolaten, chocolatine… de l’un à l’autre, il n’y a qu’un pas.

pain au chocolat vrai

Pain au chocolat ou chocolatine ? Au final, c’est sans importance !

Au vu de l’Histoire, comme au vu de la logique, il apparaît clairement que chocolatine est l’usage le plus correct à utiliser pour désigner la succulente petite viennoiserie dont nous parlons, à nous en donner faim. Cependant, compte tenu du fait qu’une majorité de citoyens français parle de pain au chocolat, il n’y a pas de raison pour que le terme chocolatine soit imposé.

Pain au chocolat ou chocolatine ? Peu importe ! Ce qu’il est plaisant de constater, c’est surtout que le terme original, chocolatine, continue d’exister dans quelques régions françaises. C’est une belle preuve du fait que le langage, s’il permet de se comprendre à l’échelle d’un ou de plusieurs pays, est aussi doté d’une complexité à l’échelle d’une région, d’une ville, d’un quartier ou même d’une famille. Et de cette complexité découle une multitude de spécificité, qui parfois forment des dialectes, qui souvent témoignent de l’esprit d’une population et qui, toujours contribuent à la richesse d’un peuple et de sa culture. Cet article permet d’ailleurs de comprendre plus avant l’importance de cette richesse.