Ici considéré comme du vandalisme et là-bas comme de l’art contemporain, le street art ne fait pas consensus. Aux Etats-Unis, le street art est perçu par une majorité de gens comme un véritable art. A contrario, en France, une large majorité de personnes le considère comme du vandalisme, ce qui est lié à une certaine conception de la chose publique et un attachement particulier au patrimoine. Seule une mince partie de la population, la petite communauté des artistes et les jeunes adhèrent totalement au street art. Que penser du street art ?
Qu’est-ce que le street art ?
Le street art concerne tous les arts et sports :
- La danse : le break dance, hip-hop, électro
- Le rap : rimes déclamées sur une mélodie ponctuée de beat, de scratching et de beatbox
- Le tag ou le graffiti
Un peu d’histoire
Le street art, traduit par art urbain, est un mouvement artistique contemporain réalisé dans la rue ou dans des lieux publics, comme son nom l’indique. Il a vu le jour durant les années 1960 aux Etats-Unis, puis a connu un léger développement en France à partir de mai 1968. Il faut attendre dans l’Hexagone les années 1980 l’impulsion d’Agnès.b et de Ernest Pignon Ernest pour que le street art soit accepté des pouvoirs publics et des Français.
Quelles sont les techniques du street art ?
Les deux principaux outils du graffiti, art urbain, sont l’affiche, le pochoir, la peinture et surtout la bombe aérosol.
- L’affiche : C’est un support en papier, plastique ou carton qui permet de rendre un contenu public, c’est-à-dire que tous citoyens, au sens des habitants de la cité, peuvent prendre connaissance de contenu, volontairement ou involontairement.
- Le pochoir : Le pochoir est une technique qui permet de reproduire une forme, appelée motif. Les atouts du pochoir sont le gain de temps dont bénéficient ses utilisateurs car aucune précision n’est requise lors du remplissage à la peinture, et le motif en question est reproduit avec exactitude.
- La peinture : Il s’agit d’une matière fluide et colorée utilisée pour dessiner des traits ou donner de la couleur à un support. La peinture est très adaptée au milieu urbain.
- La bombe : C’est l’arme du « graffiste ».
Quelle place pour l’art de la rue ?
Un conflit entre espace privé et espace public
La création artistique a traditionnellement lieu dans le secret du cabinet pour les écrivains ou dans les ateliers d’artistes. Ces espaces intimes permettent aux artistes d’accéder à une sorte de for intérieur et de se livrer : la création a donc lieu dans l’espace privé.
Quant à la publication des œuvres contemporaines, elles se font dans des lieux pas vraiment privés, et pas franchement publics, c’est-à-dire des espaces dédiés comme des librairies, ou des galeries. Les œuvres contemporaines n’ont généralement pas leur place dans les musées, car elles acquièrent une valeur artistique grâce au passage du temps, quand elles en en acquièrent une.
Le street art bouleverse cette tradition de création et de publication dans un lieu privé ou semi-privé, puisque création et publication se font dans un espace public. Est-ce que ces différences impactent l’œuvre artistique ? Et si elles l’impactent, lui enlèvent-elles sa valeur ? Difficile de répondre à cette question tant que nous n’avons pas le recul nécessaire… Après tout, les œuvres révolutionnaires ou réactionnaires ne sont jamais reconnues comme des œuvres en tant que tel par les contemporains.
Néanmoins, les moeurs évoluent. L’art s’affiche de plus en plus hors les murs, s’échappant des espaces clos des musées pour investir jardins et quais. A Paris, le musée de la sculpture en plein air a définitivement gommé la frontière entre oeuvres d’art et espace public – même si ces oeuvres ont elles-mêmes été réalisées dans des ateliers.
Des bémols passagers ou durables ?
Les œuvres urbaines ne sont pas inspirées de la rue, mais elles sont intégrées à la rue. Ou alors est-ce l’art qui est intégré à la rue ? Cette intégration de la rue dans un art ou de cet art dans la rue peut rencontrer des obstacles.
- Les graffitis, mêmes s’ils sont esthétiques, peuvent dégrader d’autres œuvres comme des églises, cathédrales ou édifices publics. A moins que la création de graffitis sur ces édifices ne soit pas de la « dégradation » de l’œuvre initial mais qu’elle donne naissance à une nouvelle œuvre ? Nan…
- Sont-ils réellement esthétiques ?
- Street art et espace public entrent en conflit. La rue est à la fois la propriété de tous et de personne. Il est donc illégal de vouloir s’approprier un espace public, puisque l’individu créateur impose son œuvre aux autres citoyens. En imposant son œuvre, il s’impose lui-même aux autres, d’autant plus que souvent, les tags sont une signature.
Pour surmonter ce conflit, il faut donc que cet art soit reconnu d’utilité publique. Autrement dit, cette œuvre devra contenir quelque chose, pour élever la cité. La reconnaissance de ce quelque chose surviendra sûrement avec le temps, comme tout art qui dérange. Après tout, le roman, avant de recevoir ses lettres de noblesse n’était-il pas un genre scandaleux, écrit par des misérables pour des misérables ?