Les plaisanteries sur les blondes sont à l’humour ce que la poupée Barbie est à la féminité : une caricature potentiellement offensante mais qui amuse encore et toujours. La série de bande-dessinée Les Blondes, créée par Gaby et Dzack, capitalise sur cet humour borderline pour mieux combattre les préjugés.

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Les stéréotypes ont la vie dure

Comme les blagues sur les Belges, les histoires drôles qui prennent les blondes pour cibles (ou les gendarmes, aux aussi croqués dans une BD) s’attaquent moins à un trait physique qu’elles ne s’appuient sur une tradition grotesque. Cette tradition, c’est la prétendue infériorité intellectuelle des femmes aux cheveux jaunes.

Ces stéréotypes ont la vie dure (comme le montre cet article), mais force est de constater qu’on ne les combat pas en leur opposant des études scientifiques. Il est tout de même assez désespérant que la page Wikipédia consacrée à la question se donne la peine de rappeler qu’ « aucun fait ne vient corroborer cette élucubration populaire » et qu’il n’y a pas de différence globale d’intelligence entre les blondes et les autres !

Mais d’où viennent les blagues sur les blondes ?

Ces saillies capillaires sont portées par un succès qui ne se dément pas. Compagnes des soirées entre amis, elles se déploient sur des centaines de sites web et même dans des recueils papier (Que fait une blonde ?, éd. Michel Lafon).

Certains spécialistes américains, qui sont peut-être blonds eux-mêmes, attribuent le phénomène à un effet pervers du politiquement correct : les blagues sexistes ou racistes n’étant plus de mise chez les Yankees, les machos auraient pris pour cible les blondes comme symboles de la vulgarité féminine, incarnée par l’image de la bimbo (Pamela Anderson et autres écervelées).

Les slogans publicitaires de Clairol dans les années 70, « Blondes have more fun », visaient à vendre des colorants capillaires. C’est sans doute là l’origine du sarcasme.

Paradoxalement, les blagues sur les blondes sont aussi une manière subversive de se moquer de l’image de la femme blonde et vulgaire, telle que la publicité l’a construite. Rien d’offensant, donc, au contraire. Enfin, tant que vous ne prenez pas pour tête de Turc une copine blonde en particulier, tout devrait bien se passer.

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La BD Les Blondes coupe les cheveux en quatre

Depuis dix ans et 22 tomes, sans parler de 12 hors-séries, la BD Les Blondes capitalise sur la tradition de ces plaisanteries grossières sous la férule du dessinateur Dzack et du scénariste Gaby. En 2005, les éditions Soleil Productions ont misé sur le bon cheval, puisque l’essai s’est transformé en triomphe et Les Blondes sont devenues un phénomène.

Retranscriptions dessinées des blagounettes du samedi soir, ces BD sont construites sur un modèle simple mais terriblement efficace : quelques cases pour un gag, une présentation rapide du contexte et une chute qui se fait (presque) toujours aux dépens de Vanessa, le personnage principal et LA blonde par excellence.

Le tout suivant un dessin clair, maîtrisé et qui tend à communiquer aisément avec le lecteur. Le style est moins précis qu’il n’est évident, parce que Les Blondes sont surtout l’occasion de raconter des situations grotesques, absurdes, stupides, mais aussi mignonnes et parfois poétiques.

Vanessa, stéréotype et cible idéale

Le protagoniste principal de la série, Vanessa, est définie par Gaby, lui-même blond(e), comme une femme aux formes avantageuses, mais dotée du Q.I. d’un enfant de huit ans. 100% cruche et bête à toute heure du jour et de la nuit, Vanessa personnifie très exactement les clichés et les préjugés attribués aux blondes.

Elle est entourée d’autres blondes – ses copines Ophélie et Amadine – mais, comme elle n’aime pas la discrimination, Vanessa accepte dans son environnement d’autres couleurs de cheveux : la brune Kim et la rousse Chloé. Elle a un petit ami, Jules (sorte de Ken pour Barbie) et un patron, particulièrement colérique et impulsif, qui l’envoie rendre visite au DRH dès qu’elle fait une « blonderie ».

Ces femmes sont belles, ces femmes sont blondes. Elles sont séduisantes, elles sont lénifiantes ; gourdes et maladroites, mais positives et pleines d’humour. Gaby et Dzack empilent les clichés pour mieux surfer dessus, et confronter le lecteur, par le rire, à ses propres préjugés. Les blondes sont tournées en dérision, mais elles n’en ressortent que plus fortes.

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Une esthétique de premier ordre

L’originalité de la BD Les Blondes réside moins dans les titres des volumes (« James Blond 007 ») que dans le travail chiadé sur les couvertures, à la fois drôles et brillantes. Elles sont réussies parce qu’elles mettent en scène la sottise des blondes tout en jouant sur le numéro ou le titre du volume. Juste génial.

En outre, le potentiel visuel évident de la série l’a rapidement poussée à s’animer. En 2007, Yann Bonnin a créé pour le web une centaine d’épisodes en animation flash, d’une durée d’1mn30 chacun, adaptés des tomes 1 à 9.

En attendant, qui sait, le film en prises de vue réelles ? Gaby a confessé que la chanteuse Eve Angeli ou l’ex-Miss France Alexandra Rosenfeld lui donnent l’impression que quelqu’un a sorti Vanessa des cases de la BD pour la matérialiser en vrai. Les USA ont pris de l’avance : La Revanche d’une blonde date de 2001 et a même été transposé en comédie musicale.

On se moque, on se moque, mais n’oublions pas une chose : les blondes gagnent souvent à la fin. Déjà, en 1953, dans Les Hommes préfèrent les blondes d’Howard Hawks, la blonde Marilyn Monroe battait la brune Jane Russell à plate couture sur le terrain de la séduction. Voyez : rien n’arrête une blonde. Et surtout pas la crainte du succès.

Avis aux volontaires : il ne vous reste plus qu’à créer votre propre BD… sur les brunes, par exemple !

Vous en apprendrez plus sur la genèse de la BD en regardant cet interview de Gaby et Dzack :


Interview de Gaby & Dzack, les auteurs de la BD… de fberto